8 février 2013

[Jean Madiran - Présent] Voici le dernier cri de la pensée catho

SOURCE - Jean Madiran - Présent - 6 février 2013
Vient de paraître : la « nouvelle évangélisation » consiste à changer le sens même du contenu de la Révélation. C’est la découverte enthousiasmante de deux penseurs « nouveaux », deux dans un seul numéro de La Documentation catholique : Teilhard et Geffré, les penseurs pour notre temps.

Teilhard fut illustre au siècle précédent, il était oublié. Geffré est moins célèbre. Et leurs deux thuriféraires sont tout à fait inconnus.

Nous allons y remédier.

Geffré et Teilhard ont en commun l’intention avouée de modifier la religion catholique selon les évolutions du monde. Et aussi en l’occurrence, d’être l’un et l’autre présentés par La Documentation catholique dans une ignorance complète de l’état de la question à leur sujet, comme s’il n’y avait pas eu leur totale déroute intellectuelle. 

Teilhard de Chardin, poète jésuite (1881-1955) passa jusqu’à sa mort, quelle acrobatie, pour un grand savant (aux yeux des philosophes) et pour un grand philosophe (aux yeux des hommes de science). Sa théologie fut désavouée même par Jean XXIII. Dans La Documentation catholique il est exhumé en huit pages de Mgr André Dupleix. Celui-ci est depuis 2005 le secrétaire général adjoint de la Conférence des évêques de France. Il dirige aussi le Service national du catéchuménat. Il a découvert une « convergence », tiens donc, entre la pensée de Teilhard et « les principales orientations du Synode romain [du 7 au 28 octobre 2012] sur la nouvelle évangélisation ». Il a organisé en novembre dernier un colloque sur Teilhard à l’Université pontificale grégorienne de Rome. « Ce qui nous manque à tous, écrit-il avec Teilhard, c’est une définition nouvelle de la sainteté. » Pas moins.
 
Claude Geffré (né en 1926) est un dominicain disciple et successeur du P. Chenu, il a été recteur du Saulchoir de 1965 à 1968 puis longuement enseignant à l’Institut catholique de Paris (1968-1996). Il est décisivement scalpé, démembré, pulvérisé sans anesthésie dans le guide sûr parmi les décombres intellectuels pré et post-conciliaires, c’est-à-dire le livre de Florent Gaboriau : Trente ans de théologie française (livre-guide recommandé aux voyageurs intrépides par Présent du 13 septembre 2003). L’exhumation de Geffré est opérée par deux pages et demie de citation ahurie et une notice hagiographique du prêtre assomptionniste Jean-François Petit, rédacteur en chef (adjoint) de La Documentation catholique, lui-même, lui aussi, de l’Institut catholique de Paris. On ne s’étonnera pas de retrouver un peu partout la complicité intellectuelle de cet Institut qui, le 24 novembre 2011, a inoubliablement canonisé Jacques Delors, le fossoyeur de la démocratie-chrétienne immergée par lui dans le socialisme : il a proclamé que ce Delors « incarne les options prises par l’Eglise catholique au concile Vatican II » et lui a promis : « Vous continuerez de guider notre action et d’inspirer nos projets. » Cela fut admirativement raconté en détail par La Documentation catholique du 15 janvier 2012.
 
La Documentation catholique est un bi-mensuel presque centenaire qui remplit une fonction indispensable : la publication, quasiment officielle, des principaux documents pontificaux. Ce bi-mensuel est édité par « Bayard Presse », qui publie aussi La Croix. On connaît les tendances démocrates-chrétiennes et socialistes de cette maison. Cela n’empêche pas forcément de faire une bonne documentation, même si certains choix documentaires sont tendancieux. Mais de plus en plus ouvertement, et donc probablement sur ordre, cette documentation devient de plus en plus militante, avec un sectarisme qui est sans doute le signe que la tension interne monte dangereusement dans le catholicisme. En attendant que l’actuel totalitarisme démocratique ou bien la prochaine domination islamiste arrive à mettre tous les chrétiens d’accord.

JEAN MADIRAN

Article extrait du n° 7786 de Présent
du Mercredi 6 février 2013