7 novembre 2012

[Dalmaticus - antimodernisme.info] Faudra-t-il aussi une herméneutique de la Tradition ?

SOURCE - Dalmaticus - antimodernisme.info - 7 novembre 2012

Préliminaire
L’état de désarroi dans tous les milieux proches de la FSSPX étant indéniable, l’auteur de ces lignes affirme cependant avec force que le sien n’a rien à voir avec le comportement et la sanction de Mgr Williamson.

Certes le premier fait historique est la publication d’une lettre des 3 évêques au Supérieur de la FSSPX, 4ème évêque consacré par Mgr Lefebvre. Mais je ne partage pas la condamnation de cette publication, car à la lecture de cette lettre et de la réponse de Menzingen, le « diffuseur » a manifestement voulu sonner le tocsin pour cause de fumées, si ce n’est d’incendie dans la Maison! Car autant la lettre des 3 évêques est claire, autant la réponse ne le fut pas.
Les faits
Juin 2011, aux ordinations d’Ecône Mgr de Galaretta prononce un magnifique sermon, affirmant clairement le but des discussions romaines: un acte de charité pastorale au service et dans le but d’un accord doctrinal.

Courant 2012, certains bruits de couloir sèment le trouble, mais il faut attendre la publication des lettres ci-dessus mentionnées pour apprendre que finalement le but des discussions a changé pour devenir un accord pratique mais sans accord doctrinal.

A Saint-Pré le 4 mai 2012, Mgr Fellay a voulu expliqué sa « ligne de crête » par des mots inattendus pour ne pas dire effarants dans les milieux de la Tradition, habitués à la clarté:

Nouvelles de Chrétienté N°135 page 10: «Chez nous je pense qu’il faudra l’expliquer comme il faut, parce qu’il y a dans ce document des expressions ou des déclarations qui sont tellement sur la ligne de crête que si vous êtes mal tournés ou selon que vous mettez des lunettes noires ou roses, vous les voyez comme ceci ou comme cela. Alors il faudra que l’on vous explique bien que cette lettre ne change absolument rien à notre position. Mais que si on veut la lire de travers, on arrivera à la comprendre de travers».

Autrement dit la langue de buis est entrée dans la Tradition: le cercle peut en quelque sorte être carré, selon les lunettes que vous prenez…..Le pire est cette photo de Mgr Lefebvre à côté, en prière apparemment, qui doit se retourner dans sa tombe? La raison de cette « lettre » est certes bonne: la Rome conciliaire a des doutes sur notre reconnaissance de ce que le pape est le pape. Mais la réponse est-elle la bonne? Ne suffit-il pas de dire par exemple que:

- la foi repose sur l’Ecriture et la Tradition,

- la Tradition est l’herméneutique de l’Ecriture,

- la Tradition est la vie, et Jean Paul II se trompe de Tradition vivante, laquelle est la nôtre, pas la pseudo-tradition vivante, mais morte car évolutive, née dans les années conciliaires (mais conçue bien avant si l’on lit les papes jusqu’à Pie II),

- la Saint Père Benoît XVI est dans l’erreur de croire à une continuité, alors que le Concile est une rupture, autant que peut l’être la Révolution face à la royauté de droit divin,

- ce n’est pas parce qu’il y a des vérités catholiques dans la révolution conciliaire comme dans toute hérésie, qu’il faut accepter les hérésies dans l’Eglise,

- et que nous attendons du Saint-Père et de lui seul qu’il évacue les erreurs de cette nouvelle hérésie, déjà condamnée «latae sentenciae» par les papes précédents sur lesquels il doit s’appuyer, et que les discussions romaines nous ont permis de présenter?
Le « secret » de la profession de foi, et la langue de buis dans la Tradition
Au lieu de cela, au nom du secret prudentiel et compréhensible dans un premier temps, on maintient le secret une fois les discussions romaines terminées, c’est-à dire que déjà sous la coupe de la Rome conciliaire, on tait le contenu de ce qui a été professé par charité à Rome (charité pastorale au service de la pureté doctrinale dont parlait Mgr de Galaretta en Juin 2011). On se soumet « pour prouver notre reconnaissance du pape », mais en taisant la profession de la foi, et la réfutation des erreurs qui en est l’indispensable conséquence.

Viennent alors inexorablement les « concessions doctrinales » et les « explications alambiquées »:

- 16 juillet 2012, suite à la nomination à Rome de Mgr MULLER, sa « doctrine de la foi » est qualifiée par Mgr Fellay de seulement « plus que discutable ». Nous ne sommes donc déjà plus dans la Rome de Mgr Lefebvre, qui a tranché la question et à laquelle il faut se soumettre, mais dans le « dialogue »: discutons mes frères de la nouvelle doctrine de Mgr MULLER, ouvrons de nouvelles discussions romaines….,

- 19 juillet 2012: Déclaration du chapître général de la FSSPX :

- «le Chapitre estime que le premier devoir de la FSSPX…»: je note le mot estimer, qui se dit normalement d’une simple opinion, qui peut encore changer….

- «avec une détermination proportionnée », on est donc dans la détermination en attente de savoir laquelle est proportionnée ou pas, en temps de guerre contre les puissances de l’enfer qui elles n’attendent plus du tout car déchaînées,

- «Pour toutes les nouveautés du Concile Vatican II…», Oh Oh, Mgr Lefebvre s’est donc trompé en accusant tout le Concile, erreurs plus vérités mélangées. Les disciples sont meilleurs ici que le maître….,

Enfin vient le Nec plus ultra de la langue de buis!

- «Également la FSSPX trouve son guide dans la Tradition constante qui transmet et transmettra jusqu’à la fin des temps l’ensemble des enseignements nécessaires au maintien de la foi et au salut, en attendant qu’un débat ouvert et sérieux, visant à un retour des autorités ecclésiastiques à la Tradition, soit rendu possible».

Les catholiques avaient la Tradition tout court, immuable mais bien vivante à condition d’en vivre. Jean Paul II leur proposa la « Tradition vivante », en fait évolutive, révolutionnaire, et donc mourant à elle-même tous les jours. Mgr de Galaretta a tenté très laborieusement à Villepreux, de nous prouver que « tout y est » dans cette déclaration, avec « notez-le » la Tradition constante! Autrement dit, au lieu de dire que la tradition vivante de Jean Paul II est une supercherie de premier ordre, on va lui opposer maintenant la Tradition constante, l’abbé Gleize ayant alors tous les numéros de SI SI NO NO pour nous expliquer en quoi la Tradition constante n’est pas la tradition morte comme le diront les conciliaires, mais bien la Tradition tout court.

Quand au « débat ouvert et sérieux », on précise qu’on attend qu’il soit rendu possible, et là j’avoue que cette formule diplomatique vaut son pesant d’or de romanité…., bravo l’artiste. Toutefois, il ne faudrait pas que cette « attente » soit par trop silencieuse de la profession ouverte de la foi, et de la dénonciation des méfaits conciliaires dans l’auto-démolition de l’Eglise.
Le gouvernement de la peur?
A ce jour les conclusions me semblent être:

- Le Saint-Père a eu peur de devoir réintégrer la FSSPX « telle qu’elle » dans l’église conciliaire. Mgr Levada était « ouvert », Mgr Muller serait un « dur »: un meilleur paravent pour le Saint-Père, qui se verrait accuser de lèse-sacro-saint concile si tous les moyens ne sont pas utilisés pour ne pas y toucher, tout en laissant le Saint-Père « les bras ouverts »,

- Mgr Fellay craint l’accusation de « schisme », moins pour la FSSPX en soi déjà « habituée » aux étiquettes infamantes, que pour le motif d’une telle déclaration, le motif de « ne pas reconnaître que le pape est le pape ». D’où la Déclaration du chapître général, dont la destination est exclusivement tournée vers la Rome conciliaire pour lui enlever tout argument en ce sens.
En guise de conclusion?
Dans l’état actuel des choses, ne pourrait-on pas conclure par:

- si erreur il y a eu, « l’échec de la tentative d’un accord» n’est-il pas dù au fait d’avoir, par volonté de prouver le respect de l’autorité juridique du Saint-Père, conservé le secret d’une déclaration de la foi, en acceptant de continuer à chercher un accord pratique en cloturant – même provisoirement – le dossier doctrinal, comme l’ont fait les autorités romaines?

- « L’Eglise est aussi humaine» certes, mais à trop le dire voire le penser, oublierait-on qu’elle est divine et que « convertir même un pape dans l’erreur » ne dispense pas de « lui dire en face » en quoi il se trompe, et publiquement, pas en catimini dans un couloir du Vatican, surtout quand il confirme un diktat de soumission à l’hérésie?

- N’est-il pas temps de quitter la langue de buis, la Révolution passant aussi d’abord par un « verbe » dont le vocabulaire sert à modifier la pensée, puis à imposer ce verbe sans autorité intrinsèque, par autoritarisme et exclusivement argument d’autorité?

- N’est-il pas temps de réconforter la foi des prêtres et des fidèles, en faisant une autre déclaration doctrinale cette fois, publique à destination du monde entier, par exemple un nouveau Syllabus des 5 à 7 erreurs cardinales inscrites dans les textes conciliaires, explicitement et infailliblement condamnées par les papes antérieurs? Une seule page devrait largement suffire, en spécifiant qu’aucun débat ne peut plus avoir lieu sur ces questions définitivement tranchées!

Il est temps que nos 3 évêques « restant sur le papier » parlent d’une seule voix et infailliblement, sur le socle d’une Tradition qui n’a pas besoin des qualificatifs supplémentaires de « vivante » ou de « constante », dans des débats sans fin, ni foi ni loi….

SI SI, NO NO, tout le reste vient du Malin…..

Dalmaticus