La plupart des cardinaux de Curie se placent avec naturel aux  côtés du pape, louant sa volonté de communion et d’unité. La parabole du Fils prodigue est fréquemment invoquée pour justifier les nombreuses ouvertures faites à la Fraternité Saint-Pie X. Connaissant peu le contexte proprement français (« Ces Français sont obsédés par cette affaire » entend-on parfois, avec bienveillance…), les responsables, non seulement peinent à comprendre les tensions locales entre les évêques français et certains militants de la Fraternité, mais peuvent s’offusquer, au nom du nécessaire esprit de communion, des réticences épiscopales à dialoguer avec les lefebvristes.
 
L’idée courante à Rome est que, face à la sécularisation galopante, il faut mobiliser toutes les forces disponibles, là où elles se trouvent, et peut-être quel qu’en soit le prix. Mais les limites du dialogue avec les partisans de Mgr Lefebvre avaient été précisées par le texte publié le 2 décembre 2011 par « L’Osservatore Romano » sous la signature de Mgr Fernando Ocariz, numéro deux de l’Opus Dei, l’un des théologiens ayant mené les discussions avec la Fraternité : « A propos de l’adhésion au Concile Vatican II ». Ce sont ses points essentiels (portée doctrinale du concile, précisions sur les degrés d’adhésion, continuité et homogénéité du magistère), qui seront pris en compte pour analyser la réponse de Mgr Fellay. Il y faudra plusieurs semaines.
 
A tout le moins, vu de Rome, la perspective de séparer de fait, au sein de la Fraternité, les tenants du lien avec Rome, des « sédévacantistes », n’est pas pour déplaire. Mais à l’inverse, le trouble suscité par un accord éventuel, parmi les Eglises concernées (France, Allemagne, Suisse) devrait être entendu par le Vatican. Les acteurs de la Curie se refusent énergiquement à faire un parallèle entre l’indulgence que Rome manifesterait vis à vis des lefebvristes, et sa sévérité dans des domaines régulièrement évoqués dans les médias : divorcés remariés, prêtres désobéissants, etc.. « Ce n’est pas du tout du même ordre » entend-on avec constance.