8 janvier 2012

[Abbé Jacques Mérel, fsspx - Le Sainte Anne] Pourquoi j’aime la Fraternité

SOURCE - Abbé Jacques Mérel, fsspx - Le Sainte Anne - janvier 2012

Nos âmes sont faites pour retourner vers la Sainte Trinité pour la glorifier et la posséder pour l’éternité. Ce retour se fait exclusivement par Notre Seigneur. Par Lui, nous nous unissons dès ici-bas à la Trinité Sainte par la contemplation de ses grandeurs, de sa bonté infinie surtout.

Le grand contemplatif de la Trinité est Notre Seigneur, depuis le 1er instant de sa conception humaine dans le sein très pur de la Sainte Vierge Marie, le jour de l’Annonciation. Dès cet instant il vient tout récapituler en Lui en devenant le 1er né de toute la création ; il vient pour donner et se donner ; il vient diffuser la charité divine sur les âmes. Lui qui voit la sainte Trinité dans son âme humaine dès le sein de sa sainte Mère, il s’offre à son Père pour ramener à Lui les âmes des hommes, pécheurs depuis le péché originel et incapables de retrouver tout seul le Dieu qu’ils ont perdu par leur faute. Cette offrande de Lui -même va se prolonger jusqu’au sacrifice de la Croix, offert par notre Sauveur, et cooffert par notre Mère du Ciel, qui nous représentait tous alors. Car Notre-Dame est la 1ère et la plus parfaite des rachetés. Elle fut parfaitement rachetée par son divin Fils, en étant non pas purifiée du péché mais totalement préservée, de sorte que Notre Seigneur voulut aussi soumettre la rédemption à son acception en notre nom à tous le jour de l’Annonciation. Elle devint dès ce moment notre Mère, et mérita d’être le réceptacle de toutes soumissions de foi au plan d’amour de Dieu, réceptacle dans lequel les âmes auront à puiser pour renoncer au péché et s’unir à Jésus-Christ.

L’acte du sacrifice du Calvaire est le grand événement de toute l’histoire, et cet évènement, par une invention extraordinaire de la charité divine, se perpétue à la sainte Messe. À chaque messe en effet, Notre Seigneur au Ciel offre à son Père l’oblation de son sacrifice au profit des pécheurs. Cette oblation, offerte une fois pour toute sur la Croix, est le grand élan d’amour de Notre Seigneur envers son Père pour le salut des âmes. C’est dans cet élan, initié dans le sein de Marie à l’Annonciation, que nous sommes entraînés, pour pouvoir avec et par Notre Seigneur, et dans la dépendance de la foi de Marie, adorer, contempler, et servir la Trinité sainte.

Cet élan à chaque messe est le sommet de nos journées, sommet de l’adoration, de la réparation de nos fautes, de l’exercice de notre foi. Evidement nous devons travailler à mettre notre vie quotidienne en harmonie avec ce moment unique de la messe, et particulièrement celui de la consécration, avec son prolongement normal de la communion. C’est toute notre vie, nos actions habituelles, nos occupations, avec ses efforts, ses vertus, ses échecs, ses péchés que nous apportons au pied de l’unique fontaine de vie pour tout offrir et nous offrir, pour implorer le pardon pour les chutes, et pour reprendre vigueur dans la contemplation simple et aimante de Dieu et de sa miséricorde. Dans cette reprise d’élan de foi et d’amour de Dieu, nous repartons remplis de reconnaissance et confiants dans la miséricorde de Dieu pour mieux nous livrer à Lui, comme Notre Seigneur, et en Marie, dans tout notre quotidien.

L’union avec Notre Seigneur dans l’acte de son sacrifice est le sommet de notre vie de foi et de charité, et nous en repartons remplis de sainte espérance. Que dire quand cette union se réalise alors que l’on est prêtre à l’autel, répétant les saintes paroles du sacrifice ? Le prêtre devient alors un instrument de l’acte du sacrifice de Notre Seigneur, acte qui traverse l’âme du prêtre et celle des fidèles par le prêtre. C’est pour le prêtre aussi le sommet de sa journée, de sa vie ; c’est ce pour quoi il est fait : permettre à Notre Seigneur de s’offrir à Dieu sur l’autel, assurer les fidèles qu’au moment où la consécration se réalise, Notre Seigneur Lui-même présente tous ses mérites dans le sein de la Trinité en faveur des âmes, et plus spécialement celle du prêtre, des fidèles présents, de l’intention pour laquelle la messe est dite et de ceux qui ont demandé cette messe.

Cette union avec Notre Seigneur est un sommet dans l’exercice de la foi. C’est une participation à la contemplation qui remplit et embrase l’âme de Notre Seigneur, tourné vers son Père en notre faveur. Toute notre vie doit pouvoir rendre possible cette contemplation, cet amour ardent de la Trinité et des âmes. Il faut donc que notre vie soit imprégnée d’un amour croissant du sacrifice, du don de soi, d’une contrition habituelle de nos fautes, pour pouvoir être unie de la manière la plus profonde possible à l’amour de Jésus-Christ pour son Père. Et n’oublions pas que le modèle et la source de cet élan de charité et de sacrifice, fondé sur la foi, se trouve en Marie notre Mère. Nous dépendons d’elle pour nos réponses de foi au désir de Notre Seigneur de nous unir à Lui, autant que Jésus a dépendu d’elle depuis le 1er instant jusqu’au calvaire, et jusqu'à maintenant pour la distribution de ses grâces.

Le combat de la foi aujourd’hui, dans le contexte de la crise de l’église conciliaire, est à mener dans cette perspective de l’union à Dieu par le sacrifice de la Messe et la Maternité divine de Marie. Tout ce qui peut ternir notre foi abîme par le fait même notre participation à la sainte messe et donc notre participation à la rédemption et à ses fruits. Tout ce qui diminue notre foi nous éloigne de la sainte Vierge Marie, elle qui est le réservoir de toute dépendance dans la foi envers son divin Fils et son sacrifice. Tout ce qui altère notre foi affaiblit d’autant notre capacité de prier, de contempler la Trinité à la sainte Messe et dans nos actes quotidiens. Et c’est ainsi qu’en disant que notre chère Fraternité est une œuvre de restauration et de défense de la sainte Messe, et plus encore du sacerdoce catholique, on inclut par le fait même l’oeuvre du combat doctrinal, de résistance à la Rome moderniste à cause de la sauvegarde de la foi. Du reste, la Fraternité ne se définit pas d’abord par rapport à la crise de la foi qui sévit dans les plus hautes autorités de l’Église, mais comme une oeuvre de restauration du sacerdoce. « Transmettre le sacerdoce authentique, non seulement la saine doctrine approuvée par l’Église, mais l’esprit profond et immuable du sacerdoce catholique et de l’esprit chrétien lié essentiellement à la grande prière de Notre Seigneur qu’exprime éternellement son sacrifice de la Croix. » Voilà l’idéal de notre fondateur, donné dans son Itinéraire spirituel.

Le sens de la foi, le désir de garder la foi et de l’exercer de la façon la plus pure possible, l’intransigeance doctrinale, la non compromission avec le libéralisme et le modernisme qui se sont introduits dans l’Église, tout cela converge vers, aboutit à, culmine avec l’union à Dieu dans la participation à la grande contemplation exercée par Jésus et Marie au Calvaire.

Le coeur du problème de notre relation avec l’église conciliaire est là. Nous bénéficions, nous prêtres et fidèles, par une grâce extraordinaire et sans grand mérite de notre part, de la grâce de Monseigneur Lefebvre, instrument de la Providence pour sauvegarder dans l’Église le sens de Dieu et du sacerdoce, et donc pour offrir aux âmes de bonne volonté un port de salut en attendant que la tempête cesse à Rome. Ces âmes ont à leur disposition le canot de sauvetage de la Fraternité pour pouvoir mettre le règne de Notre Seigneur, dans toute l’ampleur de la signification de ce règne, au centre de leur préoccupation. Or, «c’est parce que le règne de Notre Seigneur n’est plus au centre des préoccupations et de l’activité de ceux qui nous dirigent, qu’ils perdent le sens de Dieu et du sacerdoce catholique, et que nous, nous ne pouvons plus les suivre», écrivait Monseigneur dans son Itinéraire spirituel. Notre plus vif désir de fils de l’Église est de pouvoir remettre dans les mains du souverain pontife, dès que cela sera possible, ce sens de Dieu et du sacerdoce sauvegardé comme miraculeusement dans la Fraternité pour le bien général de toute l’Église. Ce trésor n’est pas à nous ni au Saint-Père ; mais il faut que celui-ci le réassume au plus vite, pour rattraper le désastre de 50 ans de pratique du libéralisme dans l’Église et d’introduction de l’esprit du monde dans l’enseignement de l’Église. C’est à notre supérieur général de nous dire ce qu’il en est et de prendre les moyens adaptés à la situation telle qu’elle est aujourd’hui.

Notre amour de l’Église, donc de son chef aussi, provient de l’élan d’amour envers la Trinité que nous puisons dans la grande contemplation de la sainte Messe.

C’est ce même élan qui nous rend si charitablement inflexibles, intraitables dans la défense de la foi. Intraitables, car l’erreur, le compromis, la diminution de la foi doivent être pourchassés par souci de protéger dans les âmes le trésor de la foi et de l’esprit de foi en vue de l’union à Dieu par le sacrifice de Jésus et de Marie. Inflexibles, car la contemplation des choses divines dans la sainte Messe stabilise nos âmes, les rend de plus en plus immuables, de l’immutabilité même de Dieu que l’on atteint dans la « grande prière de Notre Seigneur », à savoir son sacrifice. Quand le Saint-Père recouvrira-t-il pour lui-même cette immutabilité, de manière à pouvoir remettre l’Église sur les rails de la confession intègre de la foi, et à pouvoir prendre à son service notre petite armée ? Nous devons par nos prières, surtout par la récitation fervente du rosaire, demandée par notre supérieur général Mgr Fellay, attirer des grâces puissantes de conversion pour le Souverain Pontife dans ce but. Et il nous faut aussi, pour mériter ces grâces, persévérer dans la voie que nous a tracée notre fondateur, voie d’union à la grande prière de Notre Seigneur sur la croix, pour pouvoir offrir vraiment aux âmes et à l’Église des apôtres –évêques, prêtres, religieux, fidèles intrépides dans une défense de la foi sans aucun compromis avec l’erreur ni aucune aigreur ou amertume, parce que participant à la contemplation embrasant les âmes de Jésus et de Marie, et rayonnant de la charité découlant de la miséricorde de leurs Cœurs unis.

« Puissions-nous acquérir un esprit missionnaire qui transmette ce feu divin aux âmes, par l’exemple d’une foi vive qui rapporte tout à Dieu et à Jésus-Christ, éclairant les âmes sur l’infinie sagesse de Dieu, sa bonté, sa miséricorde et habituant les âmes à l’humilité devant Dieu, à adorer sa Volonté, à se mettre en totale dépendance de Lui, associant les âmes à la conquête du règne de Notre Seigneur, de son Cœur Sacré, et au règne du Coeur Immaculé de Marie. » (Mgr Lefebvre, Itinéraire spirituel)