23 novembre 2011

[Paix Liturgique] Cependant que des clercs renâclent, les jeunes et les laïcs sont favorables à la liturgie traditionnelle

SOURCE - Paix Liturgique n°310 - 23 novembre 2011

Cette fois-ci, ce n’est pas nous qui le disons mais de distingués prélats romains et la Fédération internationale Una Voce : au grand désespoir d’un certain clergé d’arrière-garde, ce sont les jeunes et les laïcs qui, en s’engageant pour l’application du Motu Proprio Summorum Pontificum, témoignent le plus de leur fidélité au pape et de leur approbation de ses vues liturgiques.

Ainsi, le 7 octobre dernier à Rome, lors de la présentation d’un livre italien consacré aux oppositions au Motu Proprio, Monseigneur Bux – voir notamment nos lettres 210, 211 et 258 – a-t-il fortement souligné le rôle moteur joué par les laïcs et les jeunes pour la bonne réception du magistère de Benoît XVI en matière liturgique. Les cardinaux Castrillón Hoyos et Farina, présents pour l’occasion, ont appuyé sans hésiter les propos de cet ami du Saint-Père.

À Rome toujours, début novembre, les représentants de la Fédération internationale Una Voce ont remis à la Curie un rapport intitulé « L’émergence de la jeunesse dans le mouvement traditionnel Una Voce ».
Ce document, qui témoigne combien le Motu Proprio Summorum Pontificum a favorisé le développement international d’Una Voce sur tous les continents (Japon, Pérou, Indonésie, Portugal, etc.), met en évidence le rôle joué par les jeunes fidèles dans ce développement.

I – MORCEAUX CHOISIS DE LA CONFÉRENCE DE DON NICOLA BUX

C’est à l’occasion de la présentation d’un précis du journaliste Alberto Carosa – L’opposizione al Motu Proprio Summorum Pontificum, Fede e Cultura, 6 euros – que don Nicola Bux, consulteur de plusieurs congrégations vaticanes et ami du Saint-Père, s’est exprimé sans détour, comme à son habitude, sur la réception du texte pontifical.
Notons que cette conférence a eu lieu dans les murs du Centre russe œcuménique et que le directeur de ce lieu, don Sergio Mercanzin, a expliqué en ouverture de la soirée que « le Motu Proprio, en incitant les catholiques à réfléchir à la question liturgique, a rapproché catholiques et orthodoxes ».

« Ce qui me frappe, a déclaré Monseigneur Bux au début de son intervention, c’est combien les laïcs et les jeunes sont en première ligne pour défendre la douce œuvre de Benoît XVI. » Il a notamment illustré cette importance de la mobilisation des jeunes et des laïcs en évoquant la messe qu’il a célébrée à Port-Marly (diocèse de Versailles - ICRSP) le 21 novembre 2010 et les contacts qu’il a eus à cette occasion avec les fidèles.

« Les cérémonies actuelles manquent de dévotion, non pas de celle de chaque fidèle pris séparément mais de celle de la communauté tout entière. » Don Nicola Bux a cité à ce propos le cardinal Antonelli, l’un des experts appelés à participer la réforme liturgique – mais qui a laissé des souvenirs très critiques – qui jugeait que « plus la réforme liturgique avançait, plus la dévotion reculait ».

Insistant sur le fait que, depuis la parution de l’instruction Universæ Ecclesiæ, les oppositions épiscopales au Motu Proprio s’estompaient doucement, Monseigneur Bux a néanmoins clairement indiqué que ceux « qui prétendent, contre le pape, que le rite romain traditionnel divise l’Église ont une attitude néogallicane ». Le Motu Proprio diviseur... voilà pourtant un "argument" que l'autorité n'hésite pas à servir aux demandeurs encore aujourd'hui pour refuser d'appliquer le Motu Proprio, à Saint Germain en Laye ou Mantes (diocèse de Versailles) comme à Saint-Malo dans l'archidiocèse de Rennes (Mgr d'Ornellas, voir lettre 289) pour ne citer que quelques exemples. Les sondages commandités par Paix Liturgique révèlent d'ailleurs, de façon concordante, que seule une minorité des catholiques pratiquants est opposée à la coexistence pacifique des deux formes du rite romain dans une même paroisse.

Enfin, après avoir rappelé que, selon la constitution Sacrosanctum Concilium sur la liturgie, la liturgie appartient à Dieu et non aux hommes, don Bux a conclu sa conférence comme il l’avait commencée, en saluant l’action « des laïcs, particulièrement des nombreux jeunes, qui contribuent à maintenir le sensus fidei » et que « nous autres, les clercs, devons respecter et soutenir ».

II – LE DÉBAT AYANT SUIVI L’INTERVENTION DE NICOLA BUX

Lors de la séance de questions-réponses successive aux propos de don Bux, deux cardinaux, présents dans la salle, sont intervenus.

Le cardinal Castrillón tout d’abord, ancien Préfet de la Congrégation pour le Clergé et ancien Président de la Commission Ecclesia Dei, qui a témoigné de la difficulté à élaborer le Motu Proprio Summorum Pontificum. Reconnaissant à quel point « mettre en œuvre le Motu Proprio a été une tragédie », il a néanmoins lui aussi mis en exergue l’intérêt des laïcs et des jeunes pour le texte pontifical. Selon lui, l’intérêt des jeunes pour la liturgie traditionnelle est « l’œuvre de l’Esprit Saint ». Plus encore, c’est toute l’herméneutique de la continuité de Benoît XVI qui est éclairée par l’action du Saint Esprit tandis que ceux qui veulent revenir sur le Motu Proprio sont, d’après le cardinal, victimes de leur ignorance. Ils oublient, ou feignent d’oublier, que « chaque geste, chaque parole, de la liturgie tridentine a été pensé théologiquement. »

Au cardinal Castrillón a succédé une originale intervention du cardinal Farina, successeur du cardinal Tauran aux Archives du Vatican. Celui-ci a expliqué qu’une partie des difficultés de réception du Motu Proprio pouvaient s’expliquer par la mauvaise diffusion de l’information pontificale au sein de l’Église – rappelons, par exemple, que le sondage de Paix Liturgique réalisé dans le diocèse de Rennes en mai 2011 indique que 44,5 % des catholiques n'ont jamais entendu parler du Motu Proprio de Benoît XVI... Combien de paroisses ou de maisons religieuses suivent-elles en effet au jour le jour les publications officielles du Saint-Siège et, plus encore, combien les mettent à la disposition des prêtres, des fidèles ou des religieux ? Une réflexion d’autant plus stimulante que venant d’un prélat confronté chaque jour à la question de la gestion et de l’accès à l’information.

Rebondissant sur ce problème de la difficile circulation de la parole pontificale au sein de l’Église, Monseigneur Bux a de nouveau mentionné le rôle des fidèles, pouvant s’appuyer sur Internet « un allié extraordinaire pour diffuser la pensée et l’œuvre du pape ».

III – LE RAPPORT D’UNA VOCE

Daté du 9 septembre 2011, ce document de 84 pages a été remis aux différents dicastères romains début novembre, en marge de l’assemblée générale biennale d’Una Voce. Il s’appuie sur une enquête auprès des membres statutaires et membres associés de la fédération, les organisations de 26 pays ayant répondu (1).

Douze questions ont été posées, allant de l’âge moyen des dirigeants et des adhérents des associations locales à l’usage qu’elles font, ou non, des médias électroniques, en passant par leurs relations avec les évêques, leur représentativité sociale et les raisons principales de l’attachement de leurs membres à la forme extraordinaire du rite romain. Les résultats détaillés de cette enquête sont pour l’instant réservés aux services du Vatican et aux membres de la Fédération internationale Una Voce (FIUV) mais son objet est clair, comme l’écrit le président de la FIUV, Leo Darroch : « Fournir une information simple mais suffisante pour montrer que les trésors liturgiques et musicaux de l’Église trouvent des supporters enthousiastes parmi les jeunes de tous les continents. »

Par l’ancienneté comme par la notoriété d’Una Voce, il n’est pas exagéré de dire que le développement international qui la caractérise depuis 2007 reflète la réalité de l’engouement suscité, partout dans le monde, par la libéralisation de la liturgie traditionnelle par Benoît XVI. Le fait que les nouveaux groupes demandant à s’affilier à la FIUV soient principalement animés par de jeunes personnes (Mexique, Malte, Cuba, Croatie, Portugal, Indonésie) est à rapprocher de la dynamique observée un peu partout au niveau des vocations sacerdotales et religieuses, toujours plus marquées par un fort désir d’affirmation identitaire.

Alors que le Saint-Père a décidé l’ouverture d’une Année de la Foi pour servir la nouvelle évangélisation qu’il a engagée, c’est incontestablement « un signe encourageant, comme l’écrit Leo Darroch, que les traditions de l’Église soient appelées à être préservées et promues par de jeunes laïcs et de jeunes prêtres et religieux. »
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(1) Australie, Canada, Chili, Colombie, Angleterre, France, Irlande, Japon, Malte, Mexique, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande, Norvège, Philippines, Pologne, Portugal, Russie, Écosse, Afrique du Sud, Espagne, Brésil, Croatie, Cuba, Indonésie, Porto Rico.