9 mars 2010

[summorum-pontificum.fr] Petite analyse d’un article de La Croix

SOURCE - summorum-pontificum.fr - 9 mars 2010
Ce dimanche 7 mars, le journal La Croix, quotidien officiellement officieux ou officieusement officiel de l’épiscopat français, vient de consacrer un article de « philologie » à la mouvance traditionnelle, sous la signature de l’inénarrable Isabelle de Gaulmyn.

Je me propose de publier d’abord un passage de cet article (précédé d’une lettre) suivi de mes commentaires (précédés de chiffres).

A]

« Intégristes ou traditionalistes? De plus en plus de lecteurs reprochent  à La Croix la terminologie par laquelle nous classons les catholiques se réclamant de la fraternité saint Pie X, celle fondée par Mgr Lefebvre. C’est qu’autrefois, les choses étaient relativement claires: il y avait deux sortes de fidèles attachés au rite ancien (préconciliaire): les catholiques qui se situaient dans l’Eglise, et que l’on nommait les « traditionalistes ». Et les catholiques se proclamant hors Eglise, schismatiques, dont les membres de la fraternité saint Pie X,  eux aussi attachés au rite ancien, que l’on désignait donc sous le terme d’ « intégristes »… »

1°) Ils doivent être nombreux ces lecteurs pour que La Croix se décident ouvertement à les prendre en compte. C’est un fait, un fait positif. L’action auprès des autorités et de la presse, fonctionne dès lors que la mobilisation est importante et constante. Cela doit être le cas.

2°) « autrefois, les choses étaient relativement claires » (comme au temps du Mur de Berlin ?). Claires, pour qui ? Pas si claires, en fait, puisque sur cet autrefois, la journaliste dit aujourd’hui n’importe quoi. Quoi que l’on pense de la Fraternité Saint-Pie X, ou pour être plus exact, quoi qu’en pense Isabelle de G., la Fraternité Saint-Pie X ne s’est jamais « proclamée » en dehors de l’Église, ni de ce fait, schismatique. Elle a toujours refusé et elle refuse toujours cette présentation ainsi que le terme intégriste qui lui est attribué pour désigner ses prêtres et ses fidèles.

3°) Toujours sur l’autrefois, on conseillera à Isabelle de G. – il n’est jamais trop tard pour bien faire – de lire, par exemple, Intégrisme, histoire d’une histoire de Jean Madiran. Pour la (petite) histoire, le livre date de 1964…

4°) Le rite ancien n’est pas seulement le rite préconciliaire et il n’est pas d’abord ancien : il est traditionnel. Il n’est pas seulement préconciliaire (même s’il le fut) : il est aujourd’hui l’une des deux formes du rite romain.

B]

« Désormais, c’est beaucoup plus compliqué… Certes, Benoît XVI, en libéralisant le rite ancien, ou préconciliaire, (la messe en latin) a contribué à brouiller les cartes. Mais ce sont surtout les comportements de ces catholiques-là qui ont changé. Certains vont se dire de l’Eglise catholique, donc fidèles au pape, mais refuser d’obéir aux évêques. D’autres se proclament hors de l’Eglise telle qu’elle est, tout en se reconnaissant proches de tel évêque, pourtant nommé par le pape. Et entre ces deux, tous les cas de figures sont possibles : participer de temps en temps à une célébration de la fraternité Saint Pie X, et en même temps pratiquer dans sa paroisse « classique », n’aller qu’à des messes en rite ancien tout en proclamant sa fidélité à Rome, et souvent, un peu de tout cela à la fois… Bref, il devient de plus en plus difficile de qualifier tous ceux qui suivent les messes de la fraternité saint Pie X d’«intégristes ». Terme qui en plus sous-entend une forme de violence que, de fait, ils n’ont pas… »

1°) Admirable exercice de style. Comment faire des reproches au Pape sans en avoir l’air. Le très embêtant Benoît XVI a compliqué une situation qui était très simple (même si elle était fausse et injuste). Il a brouillé les cartes, expression qui laisse entendre qu’il avait peut-être des intentions pas très…catholiques. De qui parle ensuite Isabelle de G. ? Les cas de figure qu’elles évoquent se retrouvent peu ou prou partout dans l’Église. Tel qui refuse d’obéir au pape mais à tel évêque. Tel qui refuse d’obéir à toute autorité sauf à sa perception des choses (très très répandu) ; tel qui va dans sa paroisse ou qui ne va pas du tout à la messe ou qui va chez le Pasteur ou qui se contente de la messe à la TV sans être malade. Etc. Comment faut-il les appeler ? Des intégristes, eux aussi ?

2°) Notons quand même une reconnaissance : le terme intégriste « sous-entend une forme de violence » que de fait la Fraternité Saint-Pie X n’a pas. Même à La Croix, les choses évoluent.

C]

« Preuve que, même lorsque l’on se dit attaché à « la tradition », on n’échappe pas à son époque. Car ces catholiques-là ne sont pas plus à l’abri que d’autres de comportements individualistes, typiques de notre post modernité : chacun choisit ses propres modalités de pratiques et d’appartenance,  revendiquant le droit de piocher ça et là, et surtout, sans vouloir se faire étiqueter dans un camp plus que dans l’autre, ni sans se mettre sous une hiérarchie plus qu’une autre…  Intégristes ou traditionalistes? En tous les cas, postmodernes… »

1°) Belle reconnaissance sans en avoir l’air. Nous sommes bien d’accord que nous sommes contaminés par la modernité et ses avatars. Comme les autres, qui ne le savent pas plus souvent que les fidèles attachés à la Tradition. Seulement, ces derniers prennent conscience que pour se soigner il vaut mieux recourir à la messe traditionnelle et aux sacrements plutôt que d’aller courir la dernière des nouveautés, en se pensant en pleine forme. La différence, c’est que les fidèles attachés à la Tradition pensent que ce bricolage religieux n’est pas un bien, favorisé qu'il est par un relativisme dont certains trouvent les racines dans des textes équivoques de… Vatican II.