10 février 2010

[Agoramag] Incorrigibles

SOURCE - XA - Agoramag / Abbé Paul Vassal - L'Aigle de Lyon - 10 février 2010

On se souvient du sermon du 15 novembre 2009 de M. l'abbé Legrand, prêtre de la Fraternité st Pie X à Versailles. Ce mois-ci, c'est le Prieur de Lyon, de la même Fraternité sacerdotale, qui nous donne une petite sucrerie aigre-douce, que je vous invite à lire ci-dessous. A travers la question de l'école, c'est au fond une fois encore les instituts Ecclesia Dei (et plus particulièrement la Fraternité st Pierre) qui sont visés par cet abbé qui porte, lui, bien son nom. Cette sucrerie, c'est l'éditorial de son Bulletin mensuel de février 2010. Pour éclairer le liseur, on précisera que l'agglomération lyonnaise compte deux écoles primaires catholiques hors contrat : l'école st Dominique Savio (dont l'aumônerie est assurée par d'anciens prêtres de la fraternité St Pierre qui ont rejoint l'archidiocèse) et l'école Ste Jeanne d'Arc, créée en août 2007. Ayant personnellement participé à la création de cette école, je dois reconnaître que les lignes de M. l'abbé ont quelque tendance à me hérisser le poil. Je trouve lamentable que l'on puisse laisser entendre que cette école, qui est aujourd'hui placée sous la direction de la Fraternité St Pierre (l'abbé Benoit de Giacomoni en est le directeur, l'abbé Jérôme Lebel en assure l'aumônerie) puissent empoisonner des enfants sur le plan spirituel.

Lire de la plume d'un prêtre l'exhortation à prier "le Père des Cieux qu'Il accorde enfin à ses petits Lyonnais un primaire où ils soient non seulement à l'abri de la perversion moderne, mais encore des compromis conciliaires." me parait effrayant. J'y vois là encore une gifle donnée à nos prêtres et à nos institutrices dont nous connaissons et reconnaissons les qualités.

M. l'abbé Vassal oserait-il nous dire en quoi l'enseignement dispensé à l'école ste Jeanne d'Arc fait courir des risques spirituels aux âmes des enfants des fidèles de son Prieuré ?

Laissez venir à moi...

Dans les premières pages de son roman historique Août 14, Soljénitsyne nous décrit les mésaventures d'un paysan trop intelligent qui, à force de roublardises, parvient à faire inscrire sa fille dans le meilleur collège de Rostov. A l'issue de ses études cette jeune fille a perdu la Foi. « Et Tomtchak comprit, un peu tard, qu'il n'avait oublié de demander qu'une toute petite chose à la directrice : si, avec tout son collège... elle croyait en Dieu. »

De même dans l'histoire du combat de la Tradition combien de parents ont cru pouvoir finasser avec la question de l'éducation de leurs enfants, et qui maintenant sur ces âmes perdues. Ces mêmes personnes, qui n'hésitaient pas à faire des heures de route pour se rendre chaque dimanche à la messe des « prêtres de Monseigneur Lefebvre » étaient dans le même temps incapables de consentir les sacrifices nécessaires à l'éducation de leurs enfants. Voire ! Quand cela n'était pas une question de principes faux, qui excluaient a priori l'éducation catholique, nécessairement de qualité moindre que celle du lycée d'état, ou le pensionnat réputé déséquilibrant pour les enfants. Les voilà maintenant se lamentant sur leurs enfants, brillants chefs d'entreprises, équilibrés semble-t-il, et non pratiquants quand ils ne sont pas évidemment athées.

Faut-il que cela se reproduise à chaque génération ?

L'Eglise a des normes très strictes sur l'éducation et les parents devraient d'eux-mêmes étudier comment cette Mère estime les choses. Il en va, ni plus ni moins, que du salut des âmes des enfants. Et parce que notre Sainte-Mère se sait en possession de secours très puissants par la grâce des sacrements, elle n'hésite pas à demander à ses enfants des sacrifices qui confinent à l'héroïsme ou, en termes théologiques, à la sainteté.

A l'époque de Pie IX, le Saint-Office donna une instruction aux évêques des Etats-Unis leur rappelant que dans l'esprit de l'Eglise, le pensionnat était une solution bien plus normale que le lycée d'état. Dans tous les cas, à cette époque-là où la scolarisation des adolescents était moins généralisée qu'à l'heure actuelle, le placement d'un enfant au lycée d'état devait toujours faire l'objet d'une autorisation de l'évêque, donnée au cas par cas.

Je ne crois pas qu'en matière de perversion des enfants, notre éducation nationale ait quoi que ce soit à envier à l'oeuvre des professeurs de la IIIème république.

Par cohérence dans le combat de la Tradition, nous pouvons même aller encore plus loin. Est-il normal de confier nos enfants à des écoles primaires dépendant des congrégations Ecclesia Dei qui s'interdisent par principe (du fait même de leur dépendance à la commission Ecclesia Dei) de remettre en cause le funeste concile Vatican II et l'apocalyptique esprit d'Assise ? Et si ces enfants ne sont pas encore capable de souffrir de cette incohérence, n'est-ce pas justement les habituer à ne plus savoir rien distinguer et leur permettre de contracter à la longue des amitiés qui parleront dans leur vie à la place de l'esprit de Foi ?

En ce mois de février, où se pose à nouveau pour les parents la question de la scolarisation de leurs enfants l'année prochaine, il est bon de se rappeler qu'un pis-aller, une échappatoire ou une demi-mesure, ne peut pas devenir, avec le temps, une solution de principe. Au contraire il est rare de voir ce genre de solution bonifier en vieillissant.

Prions le Père des Cieux qu'Il accorde enfin à ses petits Lyonnais un primaire où ils soient non seulement à l'abri de la perversion moderne, mais encore des compromis conciliaires.

Prions le Saint-Esprit qu'Il daigne éclairer les parents. Qu'Il leur donne de se poser les bonnes questions, de demander les bons conseils pour savoir prendre la décision prudente, au cas par cas...

Abbé Paul Vassal

L'Aigle de Lyon n° 244, février 2010, pages 1 et 2.